Définition du bon sens

Qu’est ce que : Définition du bon sens

L’expression sens commun désigne l’ensemble des connaissances implicites partagées par un groupe social à un moment donné, et qui sont pertinentes pour la vie quotidienne des membres de ce groupe. Lilén Gomez | Jan. 2022Professeur de philosophie

Le bon sens en tant que phénomène de masse

Le sens commun n’est pas le résultat de l’accumulation de données objectives dans le temps, ni un sens instinctif de l’être humain, mais renvoie à un produit historique qui se construit (et se modifie) progressivement à partir de la sédimentation de différentes manières de comprendre le monde, qui sont partiellement assimilées dans la conscience d’un peuple, de manière dispersée. En d’autres termes, le sens commun d’une société ne se forme pas parce que tous ses membres adhèrent activement à un courant philosophique particulier développé par un cercle d’intellectuels ou soutiennent de manière homogène une même cause politique. Il s’agit d’une connaissance générale qui prend différents éléments dans des sources qui peuvent généralement être contradictoires entre elles.
Ainsi, la connaissance du sens commun admet la possibilité de divergences entre la pensée et l’action, puisqu’elle ne suppose pas une cohérence systématique du groupe social auquel elle appartient, mais plutôt une composition fragmentaire de diverses conceptions du monde.
Il convient de noter qu’il s’agit d’un phénomène de masse, auquel participe l’ensemble de la société, même s’il est possible de distinguer les acteurs qui y jouent des rôles différents : d’une part, les dirigeants et les intellectuels, d’autre part, le peuple en général.

Politique et bon sens

Le philosophe italien Antonio Gamsci (1891-1937) est l’un des principaux théoriciens à s’être consacré à l’étude du sens commun. Gramsci a souligné la relation entre le sens commun et la politique, en tant que deux sphères inséparables de la vie, dans la mesure où le choix d’une conception du monde ou d’une autre, qui est décisif dans la formation du sens commun, est éminemment un acte politique.
À son tour, le sens commun a une fonction politique en tant que telle, car il préfigure un certain ordonnancement de la vie sociale. Toutefois, cet ordonnancement n’est pas expressément dicté par le pouvoir dominant, mais se manifeste de manière ambiguë de diverses manières. D’une part, le pouvoir dominant construit son hégémonie en utilisant le sens commun de la société. D’autre part, les classes subalternes incorporent leurs propres souvenirs populaires dans ce sens commun.
En conséquence, le sens commun apparaît comme un champ en dispute permanente entre ceux qui cherchent à lui donner des orientations différentes, et ainsi, comme nous l’avons souligné précédemment, sa construction s’avère être un processus profondément contradictoire.

Construction du bon sens

Bien que nous ayons identifié deux ‘pôles’ majeurs dans la construction du sens commun, à savoir, d’une part, les dirigeants et, d’autre part, le peuple, lorsque nous nous référons à la manière dont ce corpus de connaissances est articulé, il est nécessaire de mentionner certaines structures sociales qui interviennent dans ce processus. Les institutions éducatives, en particulier les écoles, sont un élément clé de l’État dans la formation d’une identité nationale, qui constituera une partie essentielle du sens commun, puisqu’elles constituent un réseau d’identifications symboliques pour les citoyens. Les institutions religieuses, quant à elles, rempliront une fonction similaire.
Dans les sociétés actuelles, les médias de masse et la presse se sont imposés comme des acteurs privés décisifs dans la formation du sens commun. En effet, ils disposent d’une richesse en capital qui leur permet d’avoir une portée analogue à celle des institutions dépendantes de l’État, acquérant une influence superlative sur les affaires sociales et politiques. C’est pourquoi ils ont été appelés le ‘quatrième pouvoir’, aux côtés des trois branches du gouvernement (l’exécutif, le législatif et le judiciaire).
Au cours des dernières décennies, le pouvoir des médias de masse s’est transformé parallèlement à la profonde transformation des modes de circulation de l’information introduite par les réseaux sociaux. Aujourd’hui, ces plateformes virtuelles fonctionnent comme l’un des principaux acteurs de la formation du sens commun, atteignant facilement et rapidement de larges secteurs de la société.

Bibliographie

Gramsci, Antonio. Materialismo histórico y la filosofía de Benedetto Croce. Ed. Lautaro, Buenos Aires, 1958.
Paoli, Antonio. Hégémonie, bon sens et langage. Comunicación y cultura, 1983, vol. 10, p. 75-83.